Révision

La plupart des articles (traductions exceptées) ont été révisés au cours de l'automne 2014, d'où certains anachronismes au regard de la date de publication.

vendredi 28 juillet 2023

Le Tour du monde en quatre-vingts jours

« Un jour, dira Jules Verne à des journalistes, j’ai pris un exemplaire du journal Le Siècle et j’y ai vu des calculs démontrant que le voyage autour du monde pouvait se faire en quatre-vingts jours. » On imagine aisément quelle tempête sous un crâne put déclencher cette lecture. Faire le tour du monde en quatre-vingt jours devenait possible ! Pour l’écrivain qui aimait voyager et avait fait bourlinguer tant de personnages à travers le monde entier, s’offrait là, l’occasion d’une expérience nouvelle, inédite. Ses personnages auraient à jongler non seulement avec les obstacles  géographiques mais aussi avec les impératifs temporels.

Effectuer le tour du monde en quatre-vingts jours en 1871 était de fait une performance qui pouvait manifester le triomphe de la technique sur la nature et  les éléments.  Les chemins de fers, les lignes de paquebots qui traversent les océans permettent théoriquement d’accomplir cette prouesse, Jules Verne va en faire la démonstration romanesque. Mais faire le tour du monde en quatre-vingts jours c’est aussi, d’une certaine manière, dire adieu à l’aventure. Dans ses romans antérieurs Jules Verne a envoyé ses personnages dans les zones blanches du globe terrestre, qu’ils aient cherché à gagner le centre de la terre, ou à suivre le parallèle de latitude 37°11’ ! Le monde semblait inépuisable, le voilà désormais circonscrit.

L’homme qui accomplira un tel exploit se doit d’ailleurs d’être exceptionnel, il lui faut faire preuve d’une exactitude métronomique, quel meilleur sujet qu’un de ces britanniques  méthodiques, routiniers et subitement excentriques que Jules Verne a pu observer au cours de ses voyages en Angleterre ? Phileas Fogg en sera la parfaite illustration : membre d’un club distingué, énigmatique et laconique, sa vie est réglée comme une horloge. Pour son nouveau serviteur, le français Jean Passepartout, Phileas Fogg est l’un de ces « anglais à sang froid », un « être bien équilibré dans toutes ses parties, justement pondéré, aussi parfait qu’un chronomètre. » Le serviteur inaugure, dans ce chapitre 2, la série des comparaisons et métaphores qui donnent à voir le héros du roman comme une machine.

(extrait de la préface)


Séquence disponible sur : https://www.ecoledeslettres.fr/fiches-pdf/le-tour-du-monde-en-quatre-vingts-jours-de-jules-verne-du-roman-daventures-au-roman-de-formation/