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lundi 3 août 2009

Byron et la femme de Giorgione


Nouvelle variation sur l'archétype de l'anima dans ces quelques vers de Byron, le poète s'y livre à une digression sur les vénitiennes dont la beauté classique lui rappelle un tableau de Giorgione.

XI.
They've pretty faces yet, those same Venetians,
Black-eyes, arch'd brows, and sweet expressions still;
Such as of old were copied from the Grecians,
In ancient arts by moderns mimick'd ill;
And like so many Venuses of Titian's
( The best's at Florence --- see it, if ye will ),
They look when leaning over the balcony,
Or stepp'd from out a picture by Giorgione,

XII.
Whose tints are truth and beauty at their best;
And when you to Manfrini's palace go,
That picture ( howsoever fine the rest )
Is loveliest to my mind of all the show;
It may perhaps be also to your zest,
And that's the cause I rhyme upon it so:
'Tis but a portrait of his son, and wife,
And self; but such a woman! love in life !

XIII.
Love in full life and length, not love ideal,
No, nor ideal beauty, that fine name,
But something better still, so very real,
That the sweet model must have been the same;
A thing that you would purchase, beg, or steal,
Were 't not impossible, besides a shame:
The face recalls some face, as't were with pain,
You once have seen, but ne'er will see again.

Byron, Beppo, 1818.

XI
Elles ont de si ravissants visages, ces vénitiennes,
Yeux noirs, sourcils incurvés, expression pleine de douceur,
Ce modèle qui inspira la Grèce antique,
Et que nos artistes copient sans toutefois l’égaler ;
Comme ces Vénus que l’on doit au Titien
- La plus belle est à Florence, il faut aller la voir ! –
Il semble, quand elles se penchent à leurs balcons
Que ce soit un Giorgione qui se mette en marche.

XII
Lui dont l’œuvre atteint le sommet du beau et de la vérité !
Rendez-vous au palais Manfrini, et vous verrez
Qu’il est – quelle que soit la valeur des autres – un tableau
Qui, à mes yeux, représente la quintessence de l’art ;
Il se peut qu’il vous communique de sa ferveur.
C’est pour cette raison que je rime à son sujet ;
Giorgione s’y est peint avec son fils et sa femme ;
Et quelle femme ! C’est l’amour incarné.

XIII
L’amour vivant dans toute sa plénitude et non l’amour idéal
Ni la beauté idéale, qui n'est finalement qu'un nom sublime,
Mais quelque chose de beaucoup mieux, de si réel ;
Qu’il nous semble voir le modèle lui-même,
Objet qu’on pourchasserait, mendierait, volerait
S’il était possible de n’en éprouver aucune honte;
Ce visage vous en rappelle un autre, un visage de rêve,
Qu’une fois, vous avez vu mais que vous ne reverrez jamais.

Trad. S. Labbe.
Illustration : la Vénus endormie de Giogione, Gemäldegalerie, Dresde.

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